mardi 9 mai 2017

Mathilde

       — J’ai une bonne nouvelle ! m’a glissé Françoise tandis que j’attendais Léon sur le parvis de l’église.
       Elle m’a fait signe avec sa main d’éloigner les enfants alors je les ai envoyé jouer un peu plus loin, en bas des marches. Ensuite, elle a feint de lisser sa jupe longue tout en se rapprochant discrètement de moi, comme si elle était préoccupée par les plis de son tissu et n’avait rien de spécial à me dire. Elle a relevé la tête, a salué très poliment un groupe de petites vieilles s’apprêtant à fleurir les tombes de leurs maris, puis m’a souri largement.
       — Tout est prêt, plus que quelques détails et tu pourras commencer une nouvelle vie.
       J’ai ouvert la bouche pour lui répondre mais du coin de l’œil nous avons vu Léon qui sortait enfin et s’approchait de nous.
       — Oui, tout à fait, un temps à pique-nique ! s’est alors exclamée Françoise. Mais il faut que je vous laisse, madame Clerc, j’ai beaucoup à faire aujourd’hui. Au revoir, bon dimanche !
       Et de la manière la plus naturelle qui soit, a fait un petit signe de la tête à Léon, a rajusté son chapeau et a quitté le parvis. Je l’ai suivi des yeux, le cœur battant à tout rompre tandis que Léon me prenait le bras pour m’aider à descendre les escaliers.

       C’était il y a trois semaines. Aujourd’hui, le temps est maussade, les Saint de Glaces nous ont amenés la neige et le vent fait plier la cime des arbres. Je m’assois quelques secondes et regarde autour de moi. Les portes des placards en formica sont nettoyées. Le buffet est rangé, le sol récuré et le plan de travail débarrassé. La vaisselle s’égoutte lentement à côté de l’évier.
Ça me fait drôle de me dire que je ne reviendrai plus ici, je n’arrive pas à m’y faire. Cette cuisine, ça a été ma vie pendant neuf ans et bientôt, pourtant, ce sera terminé. Je suis à la fois soulagée et terrifiée. Françoise m’a dit que c’était normal, qu’un grand bouleversement chamboulait aussi l’esprit, que c’est une sorte de rupture entre mon corps et ma pensée. Elle parle bien, Françoise. Elle sait toujours trouver les mots que j’ai dans le cœur mais que je n’arrive pas à exprimer. Sans elle, je ne sais pas ce que je serais devenue. Si j’arrive à tenir comme ça depuis des mois, c’est grâce à elle, parce qu’elle m’a redonné espoir. Bien plus que ça en fait, avant tout, elle m’a donné son amitié et c’est ce dont j’avais le plus besoin.
On n’y pense jamais assez, à l’amitié. Quand on est gamin, on joue à chat, à la marelle et aux billes, c’est facile, on n’est jamais seule. Après on grandit, on doit travailler, faire ses tâches mais ça continue d’aller de soi qu’on peut passer du bon temps avec ses amies. Puis un jour on se marie et ça s’arrête. Enfin, peut-être pas pour tout le monde, mais pour moi c’est comme ça que ça s’est passé.

Je me lève et vais me servir une tasse de café malgré mes mains qui tremblent déjà. Je me repasse les consignes de Françoise dans ma tête, dans l’ordre, c’est quelque chose sur lequel elle a bien insisté.
— Tout se passera bien si tu respectes l’ordre, m’a-t-elle dit mardi dernier chez le boucher. C’est vraiment important. Si on veut que ça fonctionne, il faut être très consciencieux. Chaque chose doit être faite au bon moment.
Pour l’instant, tout a marché parfaitement, me dis-je presque étonnée en attrapant le journal afin d’occuper mes mains. J’apprends que Jean Dubuffet est mort et j’essaie de me concentrer sur l’article mais je n’y arrive pas, mes yeux font les fous. Ils finissent par se poser sur le montant de la porte. A l’intérieur, juste à côté du papier peint à fleur, s’échelonnent des petites lignes gravées dans le bois, à environ un mètre du sol. Je devrais sourire en les voyant, parce que ce sont les tailles de Juliette et Gaspard qui y sont inscrites mais ce souvenir est bien amer. Sur la plus haute marque, il manque les trois dernières lettres du prénom de ma fille. J’étais en train de les graver, il y a trois ans, quand Léon avait surgi du salon et m’avait giflé si violemment que je m’étais tapée la tête contre le coin de la table plus loin.
— Je me casse tout le jour à l’usine pour vous fournir du manger et des vêtements et c’est ça que tu fais de tes journées ? Tu gribouilles sur les murs ?! m’avait-il hurlé.
J’étais restée interdite quelques secondes, me tenant la tête, avant d’essayer de protester mais il s’était énervé davantage et avait menacé d’en mettre une aussi à la petite si je ne la faisais pas taire. Juliette s’était réfugiée dans mes bras, des sanglots plein le corps tandis que Gaspard regardait la scène, médusé, accroché aux barreaux de son parc. J’avais consolé tout le monde et essayé tant bien que mal de panser ma plaie qui saignait abondamment à l’arrière de mon crâne. J’aurais bien été trouver une voisine ou une amie pour lui demander s’il fallait des points de suture, mais déjà à ce moment-là, je n’avais plus personne à qui parler. Léon était parvenu à faire le vide autour de moi. Alors j’avais juste désinfecté à l’alcool, me mordant les lèvres pour ne pas hurler sous la brûlure du liquide, et le temps avait fait le reste.

L’antique horloge sonne quinze heures. Je me précipite à la fenêtre et j’aperçois Françoise qui avance dans la rue au loin, comme prévu. C’est le premier signal que j’aurais jusqu’à ce soir ; tout est bien, tout continue. Je me rassois et essuie la sueur qui perle à mon front. Un instant, je me dis que je n’y arriverai pas, c’est trop pour moi. J’inspire et j’expire lentement et je retrouve un semblant de calme. Je ne dois pas flancher maintenant, si près du but, ce serait idiot. Et je ne veux pas décevoir Françoise non plus. Non pas que je le fasse pour elle, bien sûr que non, mais elle s’est tellement engagée. Depuis le jour où nous sommes devenues amies, elle ne m’a pas lâchée. Elle aurait pu, elle n’a rien à gagner dans cette histoire. A noël, je lui ai d’ailleurs demandé pourquoi elle faisait tout ça pour moi. Elle a alors haussé les épaules avec son petit sourire énigmatique avant de répondre :
— Il faut bien des gens qui aident les autres, non ?
— Je ne sais pas. C’est tellement dangereux, ai-je murmuré en sentant les larmes venir.
       — Parce que de rester ici, pour toi, ça ne l’est pas ? Ecoute, je t’ai promis de t’aider et je le ferai, alors ne te pose pas trop de questions, d’accord ? Contente-toi de me faire confiance. Le reste, je m’en occupe.
       J’appris quelques semaines plus tard, au détour de ragots, que son père avait aidé des gens pendant la guerre. Trente ans plus tôt, il avait fait sortir du pays des familles entières par le biais des chemins de fer, il était cheminot. Ça m’avait redonné du courage, un courage que je n’aurais pas eu à leur place mais que j’estimais à sa juste valeur.

Je me lève et fait le tour du petit appartement que j’habite depuis mon mariage. Tout est parfaitement rangé, je me suis mis un point d’ordre à le quitter ainsi. Je passe dans la chambre des enfants, redresse la poupée sur le lit de Juliette et tire un peu les rideaux. Ça va être dur pour eux de laisser leurs jouets, d’autant que je ne sais pas si je pourrais leur en racheter bientôt. J’ai mis de côté quelques peluches et poupées, mais nous devons voyager léger, je ne peux pas tout prendre. Je ressors et passe à côté de notre chambre à coucher, sans y entrer. Au début de notre mariage, c’était la chambre à Mémé, la mère de Léon. Elle est morte quelques semaines après, d’un cancer. Je l’ai à peine connue et je me demande quelle vie elle a eu ici avant moi. Certainement la même que la mienne. Léon n’arrête pas de dire que du temps de son père, c’était autre chose l’éducation des petits et qu’il les tenait tous avec la ceinture, qu’ils ne rigolaient pas souvent lui et ses frères. Il en parle en plaisantant, comme si il était nostalgique. Si mon père avait su ça, il ne m’aurait pas laissé l’épouser. Mais personne ne sait jamais comment la vie va. On croit qu’on fait les bons choix, et puis voilà. C’est comme la chanson de Dalida que maman écoutait à la radio : on rêve du grand amour, de quelqu’un qui nous dit qu’il nous aime pour toujours… et puis un matin on se retrouve avec des bleus plein les cuisses et on se rend compte qu’on s’est trompé. Et il n’y a plus grand-chose à faire.

Je me souviens, du bout des lèvres, j’en ai parlé à ma mère qui était venu pour la Saint-Jean, il y a deux ans. Assise à cette même table, elle a continué à peler les pommes de terre, puis au bout d’un long silence, m’a dit que dans la foi, on trouvait souvent bien du réconfort. J’avais alors songé à notre curé auprès duquel je ne manquais jamais de me confesser et qui lui, ne manquait pas de me sermonner sur l’obéissance que je devais à mon mari. Je n’étais donc pas revenu sur le sujet. Par contre, Françoise l’avait fait, c’est d’ailleurs ainsi que nous nous étions connues.
       La plupart des femmes du village et moins étions à la salle des fêtes, pour préparer les bouquets de fleurs en vue de la Toussaint, le lendemain. A la campagne, il y a peu de moments distrayants, à part les fêtes religieuses, et Léon ne m’avait pas encore interdit d’y aller à l’époque. Les discussions allaient fort, bien que chuchotées. Ça parlait naissances et mariages dans la commune.
       — Trois de prévu pour l’année prochaine, avait commenté une dame à ma gauche, le curé va avoir du travail !
       — Oh pas tant que ça ! avait rétorqué Françoise. Généralement, il ressort le même discours à toutes, non ? Femmes, avait-elle alors cité en prenant un air solennel, soyez soumises à vos maris, afin que, si quelques-uns n’obéissent point à la parole, ils soient gagnés sans parole par la conduite de leurs femmes !
       Quelques rires avaient fusé dans le groupe, vite tus par les œillades assassinent des petites vieilles plus loin. Françoise m’avait alors fait un clin d’œil, reprenant comme de rien son ouvrage. Plus tard, elle m’avait accompagné un bout sur le chemin et m’avait demandé si elle m’avait froissé par sa réplique car elle m’avait trouvé bien silencieuse.
       — Oh non ! avais-je dit en rougissant. C’est juste que je n’ai pas grand-chose à raconter. Mais vous m’avez fait rire, je vous assure.
       — Il sermonne continuellement toutes les femmes de cette manière, vous savez.
       — Vous aussi ? avais-je osé demander en jetant un œil à son alliance.
       — Il aimerait bien ! Mais malheureusement pour lui, je suis veuve !
       — Toutes mes condoléances, je suis navrée.
       — Ne le soyez pas, j’ai de la chance au contraire. Ce qui n’a pas l’air d’être votre cas, avait-elle dit sans détours en observant ma pommette qui virait enfin au jaune et m’avait empêché de sortir pendant une semaine.
       Mortifiée, j’avais bredouillé des prétextes de porte et d’escaliers, ramenant maladroitement une mèche de cheveux contre ma joue. Elle avait alors incliné la tête sur le côté, et m’avait souri, indulgente, me montrant clairement qu’elle n’avalait pas mes couleuvres. Elle avait ensuite dégagé la mèche avec laquelle j’essayais de cacher l’hématome et l’avait replacée derrière mon oreille, dans un geste très tendre, un geste qu’une mère aurait pu faire. Ça m’avait donné envie de fondre en larmes, là, tout de suite devant elle. A compter de ce jour, nous étions devenues amies, malgré Léon, malgré ma vie, de la manière la plus simple qui soit, mais surtout secrète. Je n’avais pas eu besoin de lui expliquer que si mon mari était au courant, il m’interdirait de la voir. Françoise avait compris toute seule, Françoise comprenait tout.

Trois coups discrets à ma porte me font sursauter. Je m’immobilise, le cœur prêt à sortir de ma poitrine. J’écoute mais rien de plus. C’est le deuxième signal. Dans une heure, j’irai chercher les enfants à la sortie de l’école. Je passerai par la grande rue et je devrais voir un foulard rouge, noué aux barreaux du portail de la mairie. Aux yeux de tous, il aura l’air seulement ramassé et déposé là ; pour moi, il signifiera que tout continue. Je prendrai les enfants, chacun par une main et sous prétexte d’aller chercher le lait chez madame Piguet, nous emprunterons le chemin du bois. Dans mon bidon qui devrait être vide, j’aurais pris le maximum d’affaires et quelque chose à grignoter. Ensuite, juste avant la ferme, dans le virage, son cousin nous attendra dans sa voiture. Françoise sera là, elle me remettra un peu d’argent, une autre valise et des adresses successives jusqu’à nous rendre à Paris.
       — Paris ? Mais c’est si loin ! m’étais-je exclamée quand elle m’avait exposé son plan.
       — C’est la seule ville où vous pourrez être tranquille. Ils ont ouvert un centre, à Clichy, tu y trouveras de l’aide pour repartir à zéro. Et Paris, ça a l’avantage des grandes villes, on y est très vite anonymes. Léon ne pensera même pas à t’y chercher.
— Qu’est-ce que je dirais aux enfants ?
— Le moins possible… trouve quelque chose, n’importe quoi.
Alors je leur dirai que leur père est mort, que c’est pour ça que nous quittons notre village, que nous n’avions plus d’avenir ici. Ils sont petits, Juliette n’a pas six ans, ils ne poseront pas trop de questions. Certainement on aura peur, mais je ne peux plus continuer comme ça, à me demander si un jour il ne me tuera pas, moi ou Gaspard peut-être, qui m’a dit qu’il me défendrait la prochaine fois.
D’y avoir réfléchi à nouveau m’a fait du bien, mais il me faut quelque chose de fort. J’avise la bouteille de whisky rangée au dernier étage du vaisselier. Je me souviens la dernière fois que j’y ai touché.
Mon cousin était de passage et s’était arrêté me dire bonjour. J’étais si contente de sa visite ! A part Françoise, je ne discutais avec personne. Léon m’avait finalement interdit de participer aux œuvres de l’église. Mais Léon était à Saint-Flour, j’étais seule avec les deux petits alors je lui avais ouvert grand la porte et servit un verre tandis qu’il me donnait des nouvelles de ma famille. Sur l’instant, je n’avais pas vu le mal à lui donner un peu du whisky de Léon, c’était quand même mon cousin ! Mais quand le soir venu, Léon s’en était rendu compte, il était devenu fou. Il m’avait hurlé que la bouteille avait vingt ans d’âge et que ça coûtait si cher que j’allais en pleurer. Les coups s’étaient alors abattus sur moi. D’abord des gifles, puis des coups de poing et des coups de pieds. Ça m’avait étonné d’ailleurs, parce qu’il savait que j’étais enceinte pourtant, mais rien ne l’avait arrêté ce jour-là. Je m’étais réfugiée contre le mur à côté de l’évier, me protégeant du mieux que je pouvais, mais même une fois à terre, il avait continué à s’acharner sur moi. Après, bien-sûr, il m’avait dit qu’il regrettait, qu’il n’aurait pas dû cogner aussi fort. Mais quelle importance, le petit était passé et je n’avais plus que mes yeux pour pleurer, il avait tenu parole là-dessus.

Le liquide ambré me brûle délicieusement la gorge, mais ne m’apaise pas. Je me pose plein de questions : et si ça ne marche pas, si quelqu'un nous voit partir et l’avertit ? Et si je n’arrive pas à m’en sortir toute seule après, qu’est-ce qu’on va devenir moi et les gosses ? Et s’il nous retrouve, qu’est-ce qu’il me fera ?
— N’y pense pas, me dis-je à voix haute, ne pense qu’au plan !
L’heure approche d’aller récupérer les enfants. Je passe mon manteau et mon foulard. Je prends le bidon, jette un dernier regard à la cuisine et referme doucement la porte derrière moi. Tous les bruits me semblent amplifiés. Le cliquetis de la serrure, mes pas dans l’escalier, le timbre de l’horloge… Je salue de la tête le facteur dans la rue, je regarde droit devant moi, tendue vers mon but, je ne dois pas en dévier. Le trottoir, les pavés, la mairie, le foulard, l’école. Mes bras qui se tendent vers mes petits, puis Gaspard à ma gauche et Juliette à ma droite, comme d’habitude. Le carrefour, toujours tout droit, le chemin, les arbres, le ciel si bleu soudain et Françoise, adossée à la portière de la voiture.
— On ne va pas chercher le lait ? me demande Gaspard, lui qui aime tant aller compter les vaches.
— Non, finalement non. On va faire un tour en auto, d’accord ? Je vous expliquerai plus tard, montez dans la voiture.
Ils sont bien trop contents pour protester. Moi, tremblante, je pose mon bidon sur le siège passager.
— On y est, me dit Françoise avec un sourire, avant de me présenter son cousin. Il est conducteur de bus, il a l’habitude de rouler longtemps, ne t’inquiète pas. Après, tu n’auras qu’à suivre les consignes, je t’ai tout noté ici, me dit-elle en me tendant un petit bout de papier plié en quatre.
J’acquiesce en silence, je n’arrive pas à parler. Françoise s’approche et me prends dans ses bras et je ne réalise qu’à cette minute que plus jamais je ne la reverrai.
— Ne m’écris pas, dit-elle comme si elle lisait dans mes pensées. Envoie-moi juste une carte postale, sans rien d’autre, et je comprendrais, d’accord ?
A nouveau, je hoche la tête.
       — Tu vas me manquer, parviens-je à dire dans un sanglot, tandis qu’elle me serre plus fort.
       — Ça va aller, dit-elle en desserrant son étreinte, se tournant immédiatement vers son cousin pour lui remettre les dernières indications. Faites bonne route ! nous lance-t-elle tandis que la voiture démarre lentement.

Je me pelotonne alors contre mes enfants qui collent leurs nez aux vitres et respire leurs cheveux. Je laisse les larmes couler tandis que nous dépassons le panneau indiquant le village, à la sortie du pont. Juliette s’extrait de mes bras et me demande ce qu’il se passe, alors je leur raconte l’histoire que j’ai concocté. Le cousin de Françoise me lance un regard approbateur dans le rétroviseur. Gaspard se met à pleurnicher mais s’arrête assez vite. Juliette me dévisage et glisse son pouce dans sa bouche avant de le retirer brusquement. Léon l’a frappé tellement de fois pour cet acte qu’il considérait n’être plus de son âge. Lentement, je lui prends la main et replace son pouce en lui souriant. Pendant de longues secondes, nous nous observons, puis je vois son sourire inonder son visage.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire