mardi 9 mai 2017

Junior : Souvenir d'un moment

- Devines qui j'ai vu Eli ?
- Je... Je ne sais pas, lui ai-je répondu. Sur son visage on peut lire de la satisfaction et de la sérénité ainsi qu'une joie excessive. Tout le contraire d'il y a deux mois. Elle s'était plongée dans une grande mélancolie, les ténèbres l’habitaient. Mais aujourd'hui elle rayonne.
- Alors? Reprit-elle.
Elle commença à s’expliquer devant ma mine d'incompréhension :
- Bon. J'ai vu. J'ai vu Louis XIV!!! 
Comme si c'était  un triomphe, elle se leva et pointa son index vers la lumière du soleil. Je ne comprenais rien à son délire. J'explosai de rire, sous son regard triste plein d'amertume et d’une colère incompréhensible.
- Tu ne me crois pas Eli!
- Attends, je sais que tu adores l'histoire mais de là, dis-je entre deux éclats de rire. Elle me prit les deux poignets, me leva et me dirigea vers une chaise près de la table, où était entreposé un parchemin qu’elle prit délicatement et le posa sur la commode de derrière. 
-  Bon, écoutes moi. Je vais te raconter comment je l'ai vu. Hum hum.
À partir de ce moment je restai muette, du début à la fin.
« C'était il y a une semaine, on était en cours de mathématiques quand je fus prise de sommeil. Le professeur essaya de me réveiller, en vain. Mais une fois réveillée, il m'avait mis deux heures de colle le samedi. Ce matin là, je me suis rendue à l'école. Je le cherchai mais je ne vis personne, même pas un chat. Je décidai de rentrer lorsqu’une voix se fit entendre derrière le bâtiment. Cette voix était celle de Madame  Lefoy, professeur d’histoire. Elle m'avait dit que notre professeur de mathématiques n'était pas là. Elle me conseilla de me rendre chez lui pour mes deux heures de retenues. Je trouvai ça absurde. Aller chez un professeur! Étrange, n'est ce pas? Une fois devant chez lui, j’hésitai longtemps avant de sonner. Puis la porte s'ouvrit toute seule, sans avoir eu la peine de sonner. Je reculai instinctivement de quelque pas. À ma grande surprise, un petit garçon m'accueillit. Qui aurait cru que monsieur Daemond avait un fils ? Le petit garçon me fit entrer. Les seuls mots qu’il prononça furent: «  papa est absent. Il revient bientôt, attends le dans cette pièce. » 
La pièce était peu éclairée avec des montagnes de livres ici et là. Coincées entre les livres, des feuilles. Et parmi ces affaires, quelque chose avait attiré mon attention. C'était une petite boîte de satin incrustée de fausses pierres. A moins qu’elles soient vraies ? Je l’ai pris entre mes mains. A sa surface on aurait dit qu'il fallait mettre une pièce dessus. Je me suis souvenu que le pendentif que je portai avait la même forme du dessus de la boîte. Je le plaçai pour voir, tout en sachant que rien ne pourrait se produire. Je me trompais. Une lumière forte jaillit de la boîte et m'enveloppa. Je me sentis attirée et absorbée par la boîte. Il me sembla que j'ai dû perdre connaissance. Je repris mes esprits dans un lit assez vieux, une sorte de lit que je n'avais jamais vu. La pièce sentait les fleurs fraîchement cueillies, mais il y avait une autre odeur que je ne parvins pas à discerner. Une odeur qui me donna envie de vomir.
Je me relevai difficilement. La chambre avait de jolies couleurs, un peu vieillot à mon goût. « Sûrement la chambre de Mr Daemond », pensais-je. J'atteignis la porte en bois d'ébène. Ma main d’elle-même se dirigea vers la poignée. Elle s'arrêta à quelques centimètres d’elle, quand la porte s'ouvrit.
-Enfin réveillée mademoiselle.
Un homme, ayant sûrement la quarantaine, venait d'apparaître dans l'encadrement de la porte. Grand, cheveux plaqués en arrière, costume de gentilhomme du style XVII ème siècle. Je me suis dit,  en reculant de quelque pas. " Quelle famille pourrait être fou de vêtements victorien?" Je lui demandai où je me trouvais. Pour toute réponse il se contenta de me regarder avec étonnement. J’ajoutai aussitôt: " Comment suis-je arrivée ici?" Il me répondit d'un air ahuri et comme si c'était normal. « Vous êtes venue, si j'en crois madame, pour un poste de dame d'honneur et vous êtes chez Madame Anne Marie Louise de Montpensier. » 
Devant ma mine déconfite, il s'empressa d'ajouter. " Voyons, vous êtes chez la Grande Mademoiselle" Cette fois, c'est moi qui le regardai, la bouche béante. Je me risquai à lui reposer une question" Et par tout hasard, à quelle époque sommes nous?" Il me regarda en pestant :
 "Qu’apprend-on aux jeunes demoiselles?" 
Il me fixa et me dit d'un ton détaché :
 "On est au dix septième siècle, sous le règne de Louis XIV. Autre chose?" 
Je faillis défaillir. Je lui répondis discrètement avec un faux sourire « non ».Cela cachait une crainte et une joie incompréhensible de la situation. L'homme me donna son nom, Louis François. Il m'emmena voir la maîtresse des lieux. Il me fit traverser une multitude de couloirs et de boudoirs. Ainsi que d'innombrables pièces toutes joliment décorées. Arrivés devant la dite pièce, je sus que derrière la porte se tenait la propriétaire. Je retins ma salive en pensant : " Que va-t-il m'arriver? Est-ce un rêve?"
Il frappa, ce qui me fit sortir de ma torpeur. Il attendit le "entrez" d'une dame d'honneur qui ouvrit aussitôt la porte. Il avança vers la maîtresse des lieux, se courba et m'annonça.
- Madame, voici la jeune fille. Euh...
- Anne, m'empressai-je de dire.
- Anne, votre nouvelle dame d'honneur, Madame.
Je fus éblouie par la grâce qu’émanait la Grande Mademoiselle. Rien que de la voir fût incroyable.
- Fort bien, commença-t-elle. Elle me regarda de la tête aux pieds avant d'ajouter: " Quelle âge as tu mon enfant?"
Je m'inclinai avant de répondre : " J'ai quinze ans, Madame". Ne sachant que dire, je baissai légèrement la tête en me disant intérieurement " Waouh! Je suis en train de suivre l'étiquette et le respect d'antan". Je faillis ne pas contenir cette joie.
- Vous apprendrez la vie de dame d'honneur à ma cour auprès des autres, reprit-elle.
- Bienvenue, au château d'Eu en Normandie, fit le monsieur qui s'était placé entre sa maîtresse et moi. La Grande Mademoiselle fit un signe de la main à Louis François puis on sortit. Il m’emmena dans une autre pièce où il y avait beaucoup de dames d'honneur.
Il m'apprit comment la maîtresse vivait et ce que je devais faire.
Après une semaine au côté de la Grande Mademoiselle, elle m'annonça une nouvelle de haute importance. Ma chère Eli, je ne peux de raconter toute la semaine que j'ai vécu. Donc ce qu'elle m'annonça, était qu'elle allait passer quelques jours à Versailles et que je devais l'accompagner. Je fus extrêmement excitée.
Durant deux jours elle prépara le départ. Et le jour venu, on monta dans une carriole avec deux autres dames d'honneur et elle même. On était début août 1661. Je sus cette date par l'une des dames. Le voyage dura moins d'une semaine. À notre arrivée à la cour, plusieurs personnes s'émoustillaient. La reine mère accueillit la Grande Mademoiselle en notre présence. Une fois son accueil fini, elle s'installa dans ses appartements. Elle nous donna des consignes très claires pour son séjour à la cour.
-Maintenant je vais me reposer. Tenez Anne et Claire, allez me chercher de l'eau. On sortit toute les deux, et on se dirigea vers les cuisines. Claire m'avait dit pendant le trajet qu'elle était déjà venue à la cour. J'en conclus donc qu'elle connaissait bien les couloirs de ce château. Ne te l'ai-je pas dit? Les bâtiments sont magnifiques, le château de Versailles est différent de celui d'aujourd'hui. Ma visite là-bas m’avait servi, sans quoi on se serait perdue au retour et je n’aurais plus eu de repère.
En avançant vers les cuisines, on croisa une jeune femme accompagnée de plusieurs dames. Claire s'inclina, j’en fis de même. Cette dame, dont j'ignorai le nom, nous demanda :
- Je ne vous ai jamais vu à la cour, qui êtes-vous?
Normalement notre tenue aurait dû lui donné la réponse.
Claire lui répondit:
- Nous sommes au service de la Grande Mademoiselle, Madame.
- Bien. Je suis Françoise Louise de la Baume le Blanc.
Oh mon dieu, Éli j’ai rencontré Louise de Valière, la maîtresse du roi. La première.
A peine le temps à mes réflexions pour me souvenir de cette femme, qu'elle était déjà partie. Claire à quelques pas de moi, me dit. - Qu'es ce que tu fais? Allez viens.
L'eau prise, on retourna auprès de notre maîtresse.
Dans les couloirs que l'on avait empruntés, peu de personne s'y trouvait. Ce qui donnait un air calme au Château. Or, à ma connaissance se doit être normalement bruyant et enjoué.
Enfin, on lui donna l'eau qui parut lui esquisser un sourire. Elle nous remercia et nous dit qu'après son repos elle irait voir la façon dont Versailles a changé et irait rendre visite à son cousin le roi.
Pendant l'heure de son repos, j'admirai l'extérieur ainsi que la pièce où l'on était, du sol au plafond. Je me rappelai à ce moment qu'au vingt et unième siècle on ne peut jamais dépasser les limites à certains endroits, toucher ici et là ou bien encore dormir dans un des lits. Je vis à présent le château différemment. Autre chose s'y dégageait par rapport à celui que je côtoyais lors de mes visites. Celui que je visitai était chargé d'histoire. Ici, c’était la fraicheur du moment. Au réveil d’Anne Marie Louise, cette dernière demanda à ce qu'on la rhabille et qu'on la recoiffe.
Cela fait, elle se rua vers l'extérieur de la pièce. Elle savait où elle allait, c'en était sûr. Elle croisa de nombreuse fois des hommes et des femmes.
Contrairement à tout à l'heure, les couloirs étaient animés. Elle croisa des personnes importantes comme Fouquet. Pas de Mazarin en vue, normalement il est mort au début de cette année.
Dans un des corridors, on croisât de nouveau Louise de Valière. Elle s'inclina à la vue de la Grande Mademoiselle. Cette dernière n'y réagit pas. Elle avait appris il y a peu qu'elle était la maîtresse du roi. On continua notre chemin en direction d'un endroit que j'ignorai.
Une fois arrivé, Marie, une des dames d'honneur, frappa à la porte. La Grande mademoiselle entra seule dans la pièce, après que Marie l'est ouverte. Du moins, à ce moment-là, je pensais qu'elle allait rentrée seule. Mais non, on dût la suivre à l'intérieur. La pièce avait d'innombrables détails. Elle était vaste et illuminée par un lustre magnifique d'or et de cristal. Au milieu de celle-ci, un homme était assis sur un trône. Mais pas n'importe qui, le Louis XIV en chair et en os devant moi. Je le reconnus presque immédiatement. La ressemblance avec les tableaux était là. De plus les dames d'honneur se sont inclinées, du moins se baisser vraiment très bas, en prononçant "Majesté". J’en fis de même, sauf la "Majesté". La Grande Mademoiselle qui jusque-là n'avait pas cillé s'approcha du roi et se mit à genou.
Étant donné la distance entre nous et le trône, je ne peux te dire les mots exacts de leurs échanges, bien que la pièce résonnait et renvoyait les échos.
L'entretien fini, la Grande mademoiselle nous présenta, seulement pour dire qu’on était ses dames d'honneur.
Quel stress ! Le roi nous regarda chacune à notre tour. Son regard était insistant sur Marie.
L'aura qui émanait de lui était incroyable.
Dommage Éli que tu n’aies pas vu ça!
Je me demandai ce qui allait m'arrivé, mais aussi comment j'allai rentrer chez moi. À ce moment là, mes yeux ne purent se détacher de ce personnage. La présentation et le regard du roi durèrent à peine trente secondes.
Il ne faut pas rêver, comme si le roi se serait attardé sur des servantes ou même sur des simples jeunes filles.
La Grande mademoiselle s'apprêta à sortir quant la reine Marie-Thérèse apparut aux côtés du roi. Notre maîtresse eut un regard fier, empli d'une jalousie sans nom. Son regard porté sur la reine dura qu'une demi-seconde. On sortit après la petite entrevue avec la reine.
La Grande mademoiselle pressa son pas vers les jardins. "Je veux prendre l'air", nous dit-elle.
Éli, les jardins étaient magnifiques et resplendissants.
Sous le soleil du mois d'août on apercevait ici et là des fleurs. Pas autant qu'on pourrait trouver de nos jours à Versailles. Pour rajouter à mes collections de ma visite dans le passé sous Louis XIV, il manquerait plus que le Trianon!
On y resta bien deux heures dans les jardins. Elle voulut se balader, mais au bout d'une heure elle préféra se reposer brièvement dans le parc. Pendant sa pause, je repensai à ma propre situation. Pourquoi suis-je venue à cette époque? Comment y retourner? Mais le problème majeur était de ne pas modifier le passé. Ce serait désastreux si ça arrivait. Je fis appelle à ma mémoire sur l'année 1661, d'après la date que m'avait donné Françoise, la dernière dame d'honneur qui accompagnait la Grande mademoiselle. Je ne me souvenais pas qu'il y ait eu d'événements importants à Versailles durant la période où je suis arrivée. Heureusement, imagines que j'arrive lors de l'affaire des poisons et qu’avec un mot de travers je leur dévoile la coupable ou alors Éli, étant donné que je suis arrivée chez la Grande mademoiselle, admettons que j'arrive sur l'affaire Lauzun. Voilà les interrogations qui me taraudaient lors de la pause dans les jardins.
Quand on repartit vers le château, la Grande mademoiselle nous raconta des anecdotes sur sa jeunesse. Des rires fusaient des dames d'honneur. Moi je dégustai les informations qu'elle donnait.  Arrivées au château, nous nous dirigeâmes vers ses appartements. On resta trois jours de plus au château de Versailles.
Oh Éli, je ne pourrais pas te raconter ce qui s'est passé pendant ces trois autres journées. Le jour de notre départ, la Grande mademoiselle m'envoya faire une course pour acheter un produit avec un nom compliqué que je ne saurais redire. Donc je suivais la route qu'elle m'avait indiquée, quand soudain une femme arrivât en trompe vers moi. Elle prit mes mains et commença à me parler:
- Je suis diseuse de bonne aventure. Laissez-moi regarder.
Je la laissai faire et elle reprit :
- Vous, vous venez d'ailleurs de très loin du roi et de Versailles. Vous allez avoir une double punition. Elle s'arrêta là.
Assez étonnée, je restai bouche bée. Je la vis glisser sa main dans sa poche et la tendre vers moi.
- Tenez, vous en aurez besoin prochainement. Pour rentrer sûrement. Avez-vous cinq Louis?
- Oui tenez, merci. Votre affaire marche-t-elle bien avec cinq Louis?
- Comme ci comme ça. Me dit-elle.
- Pourquoi pas vous lancez dans la fabrication de euh, médicaments?
- J'aimerais bien.
Mon intuition était bonne, il me semble avoir déjà vu cette femme avec des médicaments. D'ailleurs à notre arrivée à Versailles, je l'ai vu soigner des gens. Coïncidence Éli?
- Bah, j'essayerai. Je vais vous laisser maintenant. Ouvrez ce que je vous ai donné quand vous serez prête.
Elle fit volte face pour repartir, quand je l’interpellai.
- Attendez! Puis-je avoir votre nom?
Elle se retourna à peine et par-dessus l'épaule répondit:
- Catherine Deshayes.
Elle reprit son chemin. Je me dépêchai d'acheter ce que m'avait demandé ma maîtresse et retourna auprès de la Grande mademoiselle.
- Vous êtes en retard, vous en avez pris tu temps.
- Excusez-moi.
On allait monter dans la calèche lorsque je me suis ravisée. Je partis derrière la calèche et ouvris dans ma poche ce que m'avait donné Catherine. En l'ouvrant, une douce lumière m'envahit. Mes paupières se fermaient d'elles-mêmes.  En les rouvrant ce fut comme un long rêve. Je me réveillai dans la pièce dans laquelle on m'avait laissé. Je regardai autour de moi. Je sentais quelle que chose au creux de ma main et vis l’objet qui m’a permis de revenir au vingt et unième siècle. Cependant j'avais récupéré ma tenue de mon époque. Comment? Mystère. Lorsque la porte s'ouvrit je refermai aussitôt ma main en sentant une petite douleur dans ma paume. Mon professeur venait d'entrer.
- Bien miss Anne, suivez-moi, deux heures de colle vous attendent.
Monsieur Daemond avait remarqué que j'avais ouvert la boîte. Alors pour me racheter, j’ai dû nettoyer sa voiture. Il faut noter que la diseuse d'aventure avait raison, j'eus effectivement une double punition. Éli, c'est comme ça que s'achève mon voyage en 1661.»
Anne vient de finir son récit plus qu’époustouflant. Je la vois se lever et prendre le parchemin que j'avais aperçu tantôt. Elle me le tend et m'incite à l'ouvrir. Je m’exécute et suis étonnée de ce qu'il contient.
- C'est une preuve de ce que j'ai vécu là-bas. Oh... Elle sort de sa poche ce dont elle m'avait évoqué il y a peu, l'objet que lui avait donné Catherine. Elle me le montre, et je le regarde. Puis je détache  mes yeux des "preuves" apportées.
Elle me fixe intensément puis ajoute :
- Je sais que ce n’est pas facile à croire, mais ça c’est réellement passé.
Il est vrai que j’ai dû mal à accepter ce qu’elle me raconte. Le parchemin était en fait une sorte de lettre de recommandation. Elle était signée de la main de Louis XIV et lui était adressée. Après cette déclaration de voyage, soit disant dans le passé, me fait poser beaucoup de questions.
- Anne, sais-tu comment tu as été emmenée dans le passé ? Comment se fait-il que ton pendentif  ait réagi avec un objet qui n’est pas le tien ?
Anne ne doit sans doute pas avoir  de réponse à mes questions. Mais elle me répond :
- J’ignore comment je suis arrivée dans le passé mais ce que je sais, c’est que ça a un lien avec mes heures de colles avec Mr Daemond. C’est pour cela qu’après avoir fini mes punitions je suis allée lui parler.
Une fois encore, elle me raconte son histoire.
« Bon, comme je te le disais, je suis allée le retrouver. Il m’avait dit de retourner le voir une fois ma tâche acquittée. Je l’ai trouvé dans son bureau, qui au passage ressemble plus à un dépotoir. Ne te l’ai-je pas dit, ses bouquins dans la pièce où j’ai trouvé la jolie boîte, sont essentiellement des livres philosophiques. Ils sont portés sur Louis XIV et sur la science de voyage dans le temps. Coïncidence ?
Donc, je suis arrivée à son bureau et lui ai demandé :
- Monsieur, vous allez sûrement me prendre pour une folle, mais grâce à votre boîte j’ai voyagé dans le temps.
Il ne répondit pas dans l’immédiat. Il prit un cigare, l’alluma et commença à parler :
- Cette boîte s’appelle la « boîte des souvenirs ». Elle renferme les souvenirs de l’époque où tu t’es retrouvée. Cette boîte se transmet de génération en génération dans ma famille depuis justement cette époque. Un jour, l’un de mes ancêtres physicien voulut utiliser ces souvenirs pour pouvoir voyager à cette époque. L’envie de trouver comment y parvenir se perpétua comme une tradition familiale. Il y a un demi-siècle, on trouva la solution : un mécanisme qui doit se déclencher naturellement et par hasard comme à la loterie. Ce n’est pas un hasard que tu as réussi ce jour-là. C’est parce que je l’ai voulu.
Eli, à ce moment-là je ne comprenais plus vraiment, je le questionnai :
- Monsieur, qu’elle est le processus pour activer le mécanisme ?
Je le vis sourire et il reprit :
- Pour tout te dire, il ne faut pas  l’ouvrir pour éviter que le contenu, donc  le souvenir, s’échappe. Pour que ça se déclenche,  il faut le mettre en contact avec une boucle temporelle, soit un souvenir assez fort. Le souvenir doit être ancré dans l’objet, il faut qu’il contienne des sentiments. Le rapport avec toi, c’est qu’à plusieurs reprises je t’ai vu avec ce pendentif. Je me suis souvenu une fois dans la salle des professeurs que ton professeur de français m’avait fait lire ta  rédaction racontant ton souvenir. Tu pourras trouver ça minable, mais j’ai utilisé ta distraction en cours de  mathématiques pour que tu viennes chez moi. J’étais sûr que cette boîte t’attirerait, étant donné que tu es curieuse. Oh, et pas un mot de tout ça, ok ?
Avec un clin d’œil, pas vraiment discret,  il me lança un merci pour la voiture !
Voilà Eli, le fin mot de cette histoire. »
 Je la regarde sévèrement et lui demande :
- Tu m’as dit que tu ne pouvais pas répondre à mes questions car tu n’en avais pas les réponses ?
Un oups, sorti de sa bouche. Elle joue avec ses cheveux et ajoute.
- J’étais tellement heureuse et préoccupée que j’ai oublié que je le savais.
On rit de cette phrase, et continue notre soirée en se disant ce qu’on aurait fait s’il y avait eu d’autre personnage au moment de son excursion.

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