Cette rumeur ne l’inquiétait pas, étant décidé
à aller jusqu’au bout. Même si la reine des rhinocéros noirs, était une démone,
il était persuadé qu’elle ne pouvait pas faire face à la puissance de ses
traits. La route vers Cardioza restait sa plus grande préoccupation,
s’attendant dors et déjà à lutter contre toute l’armée de ces rebelles armés de
lances et de poignards.Il lui était difficile de trouver le sommeil. D’un bond,
il se leva de son lit, sortit de sa chambre et vint se laisser choir sur le
gazon de la cour du palais, mouillé par la rosée. Le regard perdu dans la voûte céleste, il se laissait au dépourvu des milles et une
pensées qui tourmentaient son esprit. Plus que quelques heures pour partir à la
plus grande aventure de sa vie. Oui ! Partir guerrier et revenir roi, cela
lui semblait raisonnable. Les voix des servantes lui parvinrent, dans le
silence de la nuit étoilée.Le roi venait encore de faire un malaise. Tout le
palais fut aussitôt sur pied. Il reconnu, qu’il n’avait plus beaucoup de temps,
devant lui. Offrir à sa majesté la tête de la reine des rhinocéros noirs,
c’était le prix à payer pour monter sur le trône. Rien ne pouvait résister à
cette dernière volonté du souverain. Ces dernières années, il les consacra à une
lutte acharnée contre cette faction des maudits des dieux et abattre leur
chef serait le symbole du triomphe. Les insurrections du royaume contre les
rhinocéros noirs a commencé sept ans auparavant mais ces deux dernières années,
la lutte fragilisa la couronne et divisa l’opinion publique. Une guerre sans
fondement dans laquelle la monarchie s’était rangée, décimant, sa propre population.
Autour du roi, cette guerre faisait l’unanimité et même ceux qui en réalité
comprenaient la magouille, n’avaient d’autres choix que d’être des pantins et
d’être à sa solde. Toutes les tentatives menées par la nouvelle autorité des rhinocéros
noirs, pour un dialogue, se soldèrent par des échecs cuisants. Personne n’avait
dans cette affaire songé au peuple. Oui ! A ce noble peuple d’Aded-Nou.
Perdu dans l’immensité de la grande forêt équatoriale dite des abîmes, le royaume
était peuplé en majorité par d’habiles chasseurs appelés les Adélans. Tous les
jours de leurs vies, se passaient sur ces terres où prospéraient une faune et
une flore riche en espèces. La tribu des Assafo intendante au trône régnait
sans partage sur le royaume. Quand naquit sous le règne du roi Dagot, le prince
Kiko, celui-ci offrit en sacrifice au dieu protecteur du royaume, un lion
qu’avaient combattu dans les arènes de la mort, sept chasseurs mutilés
condamnés à la peine capitale pour avoir abattu accidentellement, un sanglier,
animal sacré. Cette offrande écœura plus d’un mais la position du monarque
coupa le souffle à toute contestation.Le temps passant, le prince grandissait et
la royauté se dessinait dans les traits de son visage. A 12 ans, il partit seul de nuit, à sa première
chasse dans la grande forêt à l’insu de ses parents. Il reviendra au bout de
trois jours. Allongés, dans l’herbe humide auprès du feu de bois, sa majesté
lui conta les récits les plus invraisemblables sur les grands Assafo,
fondateurs du royaume Personnages puissants, qui ne reculaient devant rien et
qui possédaient l’intelligence et la ruse qu’incarne le sanglier. Le prince
dégageait à présent, l’aura d’un guerrier.
Un soir que le jeune prince âgé de seize
ans à cette époque-là, sortit seul au coucher du soleil, il arriva, au bord
d’un grand fleuve appelé Tog-ganou dans les contrées nordiques. Une jeune fille
de son âge poussait une pirogue sur l’eau, aidée de deux jeunes gens. Un homme
y était assis, un filet dans la main gauche, son bras droit étant amputé. Kiko
s’approcha de l’adolescente qui avançait dans l’eau.Lorsque la jeune fille lui
tendit la main et le tira dans la pirogue, elle était loin d’imaginer que
c’était le prince. La pêche était plus drôle et moins dangereuse que la chasse
pensait Kiko, lorsqu’ils revinrent de la tournée sur le fleuve. La nuit était
déjà avancée et son absence avait été remarquée au palais. Quand Fiona avertit
par son père, reconnu le jeune homme, une soudaine inquiétude s’empara d’elle.
Mais rien ne pouvait persuader ce dernier à quitter la présence de la charmante
fille. Il resta là deux jours et ses nuits à la belle étoile, à bavarder avec
sa nouvelle amie. Désormais, ses jours se passaient sur le grand fleuve,
pêchant des truites avec Fiona. Ce qu’il ignorait est que tous les mutilés qui
formaient le village de pêcheur de Kardanoma étaient des victimes de son père,
qui s’amusait à amputer la main droite à tous ceux qui murmuraient dans son
dos, hauts dignitaires, bourgeois... Il les avait nommés, les maudits des dieux
car Aded-Nou étant une contrée d’archers, un mutilé perdait toute la valeur de
son existence. Il lui était impossible de tirer à nouveau à l’arc. Vomis par la
société à cause de leur handicap, ces hommes se reconvertirent dans la pêche.
Dès que certains apprirent que Kiko, venait souvent à Kardanoma, ils
projetèrent de le faire mourir et de porter un coup fatal à la couronne. Mais
l’intervention de Harno, père de Fiona et des anciens calma les ardeurs.
Bientôt, le prince perdait le goût de la chasse et s’attachait à la pêche aux
truites et aux silures. Cette situation dura deux années et les liens se
resserrèrent entre le prince et sa belle Fiona avant que la nouvelle ne fut
portée à la connaissance du roi au prix de la vie du messager. La colère de
celui-ci s’enflamma et il cria au complot contre la vie de son enfant. Il
envoya ce dernier en forêt en compagnie d’une dizaine de chasseurs de renoms
pour deux mois. Pendant ce temps, il mit à sac le village des pêcheurs et mis à
mort tous ceux qui tombaient sous la main de ses soldats. Les survivants, franchirent
le fleuve et allèrent se réfugier en forêt et fondèrent Cardioza. C’était la goutte
qui fit déborder le vase. Des soulèvements eurent lieux à Oclor, à Nadasor, à
Helepsor-Noma et dans une dizaine de bourgs qui se rallièrent à la cause des
manchots. Les fils et filles des mutilés reçurent le soutient de plusieurs
partisans et formèrent le clan des rhinocéros noirs, en opposition au sanglier
sacré. A son retour, Kiko fut mis au courant des événements. Le village de pêcheurs devenu une ruine emporta avec lui tous les meilleurs souvenirs de la
belle vallée. Fiona était aussi portée disparue. Deux années s’étaient écoulées
avant que le jeune homme ne porta un dernier coup à la rancœur qu’il avait
nourrit à l’endroit de son père. Finalement par la médiation des anciens, tout
revint en ordre et le vieux singe plaça son fils à la tête de la grande armée
des Adélans. Le prince devint la marionnette du souverain et remportera une
victoire écrasante sur une dizaine de bastions rebelles se faisant ainsi un
nom, le redoutable guerrier de la vallée de Tardasso. Au cours de leur dernière
bataille, le souverain, venu faire revue des troupes fut victime d’un mauvais
sort venant de la jeune reine des rhinocéros noirs. Il en résulta une maladie
mystérieuse que nul dans le royaume ne put guérir. C’était la fin des guérillas
sauvages. Aujourd’hui, une seule chose comptait pour sa majesté au bord de la
tombe, la tête de celle qui l’a plongé dans ces années de douleurs. Le coup de
grâce devrait être porté par le futur roi. Il voulait être sûr que son fils
exterminerait cette menace à tout jamais. Le jour se leva plein de surprises et
d’aventures. Les deux compagnons de mission du prince vinrent au palais
recevoir en personne du souverain, les consignes. Le prince était encore dans
le sanctuaire du dieu Adélanou, le protecteur des chasseurs consultant les
morts auprès de la prophétesse Adasossivi.
-Tu ne seras plus le même lui avait répété
incessamment la prêtresse. Certes tu deviendras roi mais ce que tu auras à
payer en retour comme tribut est trop lourd pour toi.
-Aucun sacrifice n’est trop grand lorsqu’il s’agit
de monter sur le trône des Adélans, s’empressa de répondre Kiko.
La nuit tombée, les trois chasseurs
prirent la direction de Cardioza, située au nord de la forêt. C’est là que les
troupes des rhinocéros noirs s’étaient retranchées après leur dernière escapade
suite à la défaite de Tardasso. Le carquois au dos, la gibecière en
bandoulière, l’arc à la main, la dague dans son fourreau ceint aux reins, les
trois hommes s’avançaient vers le but. A Aded-Assafo, capitale du royaume, le
peuple se préparait au retour de son futur roi. Marchant dans les bois
ténébreux, aux aguets, Kiko, perçut au loin un bruit étouffé de pas. Il s’immobilisa
et ses amis à leur tour. Le silence qui s’installa, fut pesant. Il n’eut plus aucun
signe. Environ trois minutes s’écoulèrent avant que la marche ne reprit. Une
heure plus tard, la compagnie arriva au premier point de ralliement où ils
décidèrent de camper pour la nuit. Impossible de trouver le sommeil, tant le
désir de devenir les héros du royaume, bouillonnait dans leurs veines. Camar
contemplait le pendentif que sa douce fille Eméfa lui avait confectionné pour son
départ. Agadh quand à lui, dessinait des figures sur le sable éclairé par le
feu de bois. Brusquement des craquements sourds se firent entendre. Quelque
chose se rapprochait d’eux à une allure vertigineuse. Les arcs armés de
flèches, ils attendaient patiemment. A la lueur des flammes, ils discernèrent
trois rhinocéros montés de guerriers brandissant des lances épaisses. C’était
les rhinocéros noirs. Une lance frôla la tempe du prince. L’instant était fatal
et il fallait se disperser. Les trois mammifères s’acharnèrent sur le feu de
bois et l’éteignirent. Embusqué, Camar lâcha sa première flèche qui transperça
le cou de l’assaillant qui tomba au sol. L’animal devint comme fou et se rua
sur le chasseur dont le second tir vint lui loger entre les deux yeux. Dans sa
course folle, il vint heurter l’ébénier qui se trouvait sur son passage et
mourut. Avant que Camar ne se retournât, la lance du deuxième guerrier
transperça sa jambe droite.Il s’écroula, agonisant, incapable de se relever.
Prit pour cible par son bourreau qui se dirigeait droit sur lui, il tentait de
reprendre sa lance et la flèche dont il l’avait armé. Aussitôt que le gros
mammifère arrivât à sa hauteur, il poussa un cri de douleur. Les flèches tirées
par Kiko, avaient transpercé le cœur du guerrier et briser les deux pattes. Agath blessé
légèrement au cou, était prit dans une course folle à travers les bois où à plusieurs reprises,
il avait esquivé de justesse la lance de son assaillant. Kiko ajusta son tir et atteignit l’homme au bras droit. Avant
que son deuxième coup ne parti, il s’échappa avec sa monture à travers les
bois. Le silence domina la forêt en un instant. Les trois compagnons, se
groupèrent mais il n’était plus question de rallumer le feu. Ce serait
s’exposer à nouveau.A l’aube, ils levèrent le camp après avoir inhumé leurs
victimes et soigné l’animal blessé. Plus que deux jours de marche à travers l’immensité
de la forêt pour arriver à Cardioza. Camar marchait avec grande peine. Le
garrot qu’Agadh lui avait placé pour stopper l’hémorragie avait été remplacé
par un pansement fait à base d’écorces de plantes. Au couché du soleil, ils
arrivèrent sur le rive de la Loza, une rivière affluent, du fleuve des abîmes.
L’endroit était favorable pour attirer leurs ennemis dans un piège. Au milieu
de la nuit des craquements sinistres se mêlèrent à celui des bois qui se
consumait dans le grand feu allumé sur la berge. Les visiteurs attendus étaient
là. Le feu de bois attira à nouveau les gros mammifères montés d’hommes armés
de lances.Au signal convenu par les trois chasseurs, les rafales de traits,
s’abattirent sur les inconnus. Le prince avait décrété de ne plus faire mourir
les montures mais de les neutraliser par des tirs ciblés aux pattes afin de les
soigner après. En plus de quoi, la vie des assaillants devraient être le plus
possible épargnés. En réalité, il voulait par là éviter que la reine ne soit
tuée par un autre. Il se réservait le droit d’en finir avec elle. Après
quelques minutes tapis dans l’ombre, ils sortirent des bois et vinrent
constater les dégâts. Avant qu’ils n’aient le temps de placer quelque mot, des
dizaines de flèches, fondirent sur eux. Sur ce, Camar s’écroula au sol. Touché
par deux tirs à l’abdomen et au cou, amoché et baignant dans son propre sang,
il était resté cloué à terre. Réfugiés en toute vitesse derrière deux arbres,
ils comprirent que d’autres guerriers en appuis aux précédents avaient suivit la
scène de leur attaque cachés dans la pénombre. Un silence de cimetière plana
après l’assaut. Kiko se rendit compte que leurs assaillants étaient en
mouvement pour tenter de les cerner. Alors la fine oreille du jeune prince se
mit en branle et le moindre faux pas, le moindre bruit étouffé de pas suffisait
pour transpercer la victime d’un tir adroit. Le redoutable guerrier de la
vallée de Tardasso vint seul au bout de la dizaine d’hommes. Lorsque le calme
revint, il fut déjà tard pour sauver le brave chasseur qui s’était vidé de son
sang. Ses deux amis le pleurèrent et l’inhumèrent. Kiko s’éveilla de son
cauchemar habituel tout transpirant. Agath dormait profondément. Perdu dans ses
pensées, il perçu un bruit dans les buissons. Il tira son poignard et se leva.
Une jeune fille voilée sortit de l’obscurité et s’avança.
-Qui es-tu demanda Kiko d’une voix teintée
d’inquiétudes. La réponse ne tarda pas. La jeune fille se contenta de soulever
son voile de son cou et de laisser apparaître la marque du rhinocéros noir. Les
mains du prince se fortifièrent. La reine tant cherché était là devant lui.
-Qu’as-tu fait jeune fille pour que les dieux te
livrent à ma merci ? Il eut droit au silence en guise de réponse. Elle
vint se prosterner au pied de l’homme.
-Gloire au prince et futur roi des Adélans, fit elle
avant d’ajouter je viens m’offrir à toi en guise de sacrifice suite aux rumeurs
qui me sont parvenues.
-Et que disaient ces rumeurs demanda le chasseur qui
recula de trois pas par prudence
-Le trône des Assafo à besoin de répandre à terre
mon sang et de fouler au pied ma tête pour que le futur roi puisse entrer en
possession de la couronne. Mais j’ai un seul souhait.
-Quoi donc ?
-Que vivent en paix sous ton règne, ce peuple que
ton père avait pris plaisir à mutilé et que tu as de toute ardeur combattue. Ces
hommes que tes amis et toi avez tués hier et aujourd’hui, ont laissé derrière
eux des orphelins que demain tu écraseras à leur tour. Mon souhait est que
cette guerre cesse avec son cercle d’effusion de sang. Mon noble et sage prince
c’est là mon vœu.
-Ce n’est pas à toi de décider que cette guerre
finisse ou non. Je te laisse partir en paix pour cette fois. Mais demain à la
tombée de la nuit je trancherai ta tête de mes mains, je l’ai juré.
-Pourras-tu me regarder dans les yeux et trancher ma
tête prince Kiko ? Non je ne le crois pas. A moins que tu ais effacé de
les souvenirs de ces terres de prodiges où tu passais tes journées à patauger
dans l’eau du fleuve en pêchant des truites ? Dans cette vallée personne ne
t’avait méprisé pourtant ton père nous a rendu le mal pour le bien et toi avec.
As-tu déjà oublié que les hommes de cette contrée t’avaient donné leur
fille ? Celle qui t’as aimé et qu’en retour, tu as abandonnée ?
-Qui es-tu pour parler ainsi s’emporta le prince en
brandissant son poignard.
-Celle, que tu as abandonnée après lui avoir promis
une place à tes côtés dans le palais des Adélans. Fiona, conclut-elle en ôtant
son voile. L’effet porta. Kiko n’en revenait pas à ses yeux.
-J’ai cru que tu étais morte répondit-il froidement.
Agath qui s’était éveillé suivait la scène.
Doucement il arma son arc d’une flèche tirée de son carquois. Il avait reçu du
roi, qui connaissait bien l’identité de la reine des rhinocéros noirs, l’ordre
d’abattre celle-ci, si le prince ne se montra pas à la hauteur.
-Prince Kiko, il était déjà tard pour retourner en
arrière. J’ai décidé de sacrifier ma vie pour la liberté de mes frères de
circonstances alors tues moi.
Le jeune homme n’en revenait pas il s’avança pour la
prendre dans ses bras quand une flèche atterrit dans les bras de celle-ci.
L’homme se retourna et échappa de justesse au deuxième tir qui se planta dans
l’omoplate de la reine.
-Arrêtes, ordonna Kiko en menaçant son compagnon de
son poignard. Il ne prenait point garde à lui et prenait à nouveau pour cible
celle-ci qui de son mieux tentait de se frayer un chemin à travers les bois.
Une lutte se déclara entre les deux frères d’armes à la faveur du redoutable
guerrier de la vallée de Tardossa qui blessa Agath à l’abdomen.
-Achèves moi prince Kiko ou tu le regretteras
avait-il lancé au prince qui s’en allait. Il n’avait pas de temps à perdre. Il
devrait à tout prit rattraper Fiona et la soigner. La jeune fille tomba à
nouveau sous un tir qui lui transperça la jambe droite. Elle se releva et se
remit en route, titubant. Le chasseur était décidé à en finir. Le fils du roi,
accourut et l’assomma et revint sur ses pas. Il rattrapa Fiona au guet Nansoupa
situé en amont de la rivière Loza. Il l’embrassa et la prit dans ses bras. Ils
pleurèrent l’un sur l’autre.
-Tu saignes mon prince remarqua t’elle suffocante.
-C’est sans importance maintenant. On va te soigner
répondit-il en levant la tête vers les guerriers de la reine qui arrivaient par
le guet.
-Promet moi de protéger ce peuple fit elle à
l’endroit de son bien aimé.
-Je te promets, on le protégera ensemble.
Elle tira le poignard de Kiko de son fourreau,
poussa se dernier de côté et transperça le cou d’Agath de la lame. La reine des
rhinocéros noirs avait sauvé le prince au prix de sa vie. Elle reçut dans sa
poitrine la flèche que le chasseur avait destinée au prince.
-Que le prince vive et préserve mon peuple
murmura-t-elle.
Un sourire se dessina sur les lèvres de la jeune
fille mourante. Un dernier baisé, un baisé d’adieu ensanglanté. Malgré ses
appels incessants et les soins de ses compatriotes, elle soupira. Une soudaine
inquiétude fit frémir, son être tout entier. Il posa le corps à terre. Tous les
guerriers vinrent pleurer leur reine. Une chose était certaine, il venait de
perdre définitivement la jeune fille de Kardanoma. Il sortit son poignard et le
posa sur le cou de celle-ci. Tous fermèrent leurs yeux remplis de larmes. C’était
leur fin.
La
sentinelle postée sur la tour de guet alertèrent les gardes qui ouvrir la
porte. Le futur roi venait de faire son entrée sur un rhinocéros noir. La
trompette retentit et en une fraction de seconde, le palais fut submergé. Le
roi sur son trône, était entouré du conseil des anciens. Le jeune prince
s’agenouilla devant son père et lui baisa les pieds et y déposa un linge.
S’étant retiré de deux pas il s’adressa au souverain en ces termes :
-Trouve ici grand roi Dagot, ta consolation et
puisses tu t’en aller en paix auprès de tes pères.
Le roi donna l’ordre qu’on dénoua le linge. Une main
d’homme, ensanglantée s’y trouvait.
-A qui appartient cette main prince Kiko demanda au
bord de l’explosion son altesse.
-C’est la mienne ! Pardonnes moi père de
n’avoir pas pu me montrer à la hauteur de tes attentes.
-Tes compagnons ont-ils osé te porter la main
dessus ? Dit le moi afin que leur descendance soit anéantie.
-Personne mon roi ne pourrait dans tout ce royaume
faire du mal au futur roi que je suis. Même pas les nobles hommes de Kardanoma
qui ont péri par tes mains. Cette main incapable de couper la tête à leur
reinen’avait donc d’autre sort que d’être mutilée.
-Comment as-tu pu te permettre de te mutiler, toi le
seul héritier du trône des Adélans ?
-Puisse le roi être apaisé dans sa colère. Et se
tournant vers le peuple rassemblé dans le palais, il leva son avant-bras droit
mutilé et dit : ‘‘ Peuple d’Aded-Nou, n’est ce pas nos braves aïeuls qui
ont bâtit ce royaume et dompté les fauves qui s’y trouvaient ? Etaient-ils
divisés ? Non ! Sinon leurs œuvres n’auraient point abouties.
Avaient-ils parmi leurs frères, des esclaves, des maudits ? Non !
Puisque la devise des chasseurs qu’ils étaient, est solidarité.Au commencement
il y avait, un peuple et une seule terre. Alors j’ai ôté ma main droite de mon
corps pour qu’à chaque fois que vous voyez votre roi, que vous tolérez votre
frère qui comme lui est manchot. Je déclare absurde cette guerre contre les
maudits des dieux. Unité c’est désormais le mot d’ordre. Dagot laissa tomber la
main inerte de son fils. Une hystérie le frappa.Il mourut à l’aube et son fils
monta sur le trône. Tout le peuple vénérait la sagesse du nouveau roi.
La dépouille de Fiona, reine des
rhinocéros noirs, fut ramenée de Cardioza et inhumée dans le mausolée royal.
Elle devint l’emblème de la lutte pour la liberté des Adélans, jusqu’à ce jour.
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