« De Dieu ! » pensais-je par-devers moi.
Depuis l’aube, j’étais en train d’éplucher les albums photos d’un certain Mike, au nombre de 200 à peu près, et je venais juste de refermer celui consacré aux tickets de bus qu’il avait utilisés sa vie durant, lorsque je l’avais trouvée. Je n’arrivais pas à comprendre pourquoi ce type avait photographié tous ces merdes - des centaines, que dis-je, des milliers de photos sans intérêt, des boites de piles alcalines aux successions de carrelages ébréchés - et les avait réparties, selon une alchimie mystérieuse et incompréhensible, dans ces dizaines d’albums. Les épreuves étaient toutes plates et ternes, et la vie n’y était jamais présente, même les plantes en étaient exclues, jusqu’à ce cliché.
La photo était glissée sous le film, de protection, de la couverture du cahier numéro 183 et j’aurais pu ne pas la voir si un petit coin argenté n’avait attiré mon attention. C’était effectivement une photo différente de toutes celles que j’avais pu compulser jusqu’alors, foutrement différente même, puisqu’habitée : elle représentait une femme et des plantes…
Vêtue d’un short ultra-court et d’une veste de Dalida, la gonzesse, encadrée par deux yuccas devant un mur blanc, tenait une arme. Sur le haut de sa veste, en lettres pailletées, deux à droite, deux à gauche, le nom : « Mike » était inscrit. Je relevais les yeux et balayait la pièce du regard : les deux yuccas, identiques à ceux du cliché, me faisaient face, avec le mur blanc en arrière-fond. La femme s’était tenue là.
C’était une brune, avec une coupe au carré, des yeux noirs et un petit nez retroussé. Elle tenait le flingue d’une main ferme et, à la base de son cou, le haut d’un tatouage apparaissait, indéchiffrable, une suite de lettres qui s’entortillaient et disparaissaient sous la veste. Pas d’autres indices mis à part l’arme qu’elle pointait. Dans un des albums, il y avait une vaste section consacrée aux armes de Mike. Comme le reste, il les avait prises en photos : une dizaine d’armes de poing, un fusil à double canon et une Winchester à crosse ajourée. Je saisis le bouquin dans le tas constitué au sol et le feuilletait à nouveau. Un Walther PPK parabellum semblait être le flingue que la femme braquait vers l’objectif. En observant les différentes prises de vue, je repérai l’éraflure du pontet, apparente sous le doigt de la fille. Le Walther était bien celui de la photo. Je reposais le livre, avec l’image comme marque-page : mon enquête progressait. J’allais bientôt pouvoir imaginer que cette belle avait dézingué mon sbire avec, pour seuls témoins, les yuccas stoïques qui me faisaient face. Il ne me restait qu’à retrouver le corps, à m’assurer de sa mort, et ensuite, ou avant, retrouver la miss en short, et le Walther, et secouer cette dernière pour récupérer le pognon dont elle avait sûrement soulagé le photographe...
Une peccadille.
Le type avait disparu depuis trois jours, le soir même du jour où il avait emprunté quarante mille dollars à rembourser le lendemain. Le prêteur sur gages, homme de bon sens, s’était laissé le temps de réagir. Ce client lui avait semblé si peu susceptible de s’enfuir qu’il aurait été davantage inquiet s’il avait prêté le pognon à un paralytique incarcéré. Pendant deux jours, le taux d’intérêt étant de 20% par jour, le préteur n’avait pas vu d’inconvénient à ce que l’employé de bureau prenne un peu de retard, puisque cela lui rapporterait huit mille dollars supplémentaire par lever de soleil. Mais ce matin, il avait reçu un petit colis avec le nom de l’expéditeur inscrit dessus et c’était celui de Mike. A l’intérieur, point d’argent mais un objet oblong emballé. C’était un doigt, un majeur coupé net à sa base, celui de son client si l’on en croyait la chevalière qui l’habillait, MG pour Mike Glabre. Inscrite sur le papier, une petite phrase avait éveillé son attention, pour ne pas dire plus, « je t’encule ! », et l’avait incité à balancer sa tasse de café à la gueule de son épagneul breton et à me passer un coup de fil.
De cet échange, en avait découlé ma quête qui consistait à retrouver ce Mike, et soixante-quatre mille dollars, la somme initiale complétée par trois jours d’intérêts, et vingt mille de préjudice, pour la contrariété ressentie par mon employeur au petit déjeuner face à un doigt qui se foutait de sa gueule, et quinze mille de plus, en guise de salaire pour ma peine...
Dès potron-minet, j’avais commencé à fouiller l’appartement, selon la méthode suédoise qui alliait le décollage de la tapisserie à l’exploration de la cuvette des sanitaires en passant par tout le reste. Nada. Cet appartement était un appartement témoin qui aurait pu faire partie de l’étage déambulation d’un magasin IKEA : il n’y avait que des meubles moches, des tableaux de peintres flamands, des placards vides et des rideaux d’une couleur étrange relevant d’un goût misérable. Rien, hormis les albums-photos, ne démontrait que ce logement avait été habité par autre chose que les deux yuccas.
Où es-tu Mike ? Houhou ?! Où est ma monnaie ?!?
Je pris l’album des armes, récupérai la photo et regardai la fille, droit dans ses yeux noirs de fille motivée. C’était par elle que j’allais commencer mon investigation: j’aimais son short et son tatouage m’intriguait. Il ne me restait qu’à faire parler les yuccas. Je dépotais donc les deux témoins, les étranglaient, les tordaient et finalement les brisaient, pour n’obtenir aucun aveu, pas même l’once d’un indice, mais tuer des plantes a toujours été un réel plaisir que je ne m’interdisais jamais.
Avant de partir, je rassemblai dans un sac l’album des armes, celui dans lequel j’avais trouvé la photo, et un autre, consacré aux plats préparés, parce ce que je trouvais vraiment incroyable qu’un mec puisse prendre en photo sa bouffe sur une décennie ! Sous mon habit de vieille dame massive – je suis toujours déguisé pour les visites à domicile – je me dirigeai, ensuite, vers l’ascenseur et appuyai sur le bouton d’appel. La cabine arriva en chuintant, la porte s’écarta en soufflant, la lumière vive m’éblouit un instant et la femme était là, en face de moi. Sans flingue ni minishort mais c’était elle, appuyée contre la paroi en train d’écouter son portable au casque. Elle releva la tête et me salua, moi la vieille, d’un regard occupé par ailleurs. Elle portait un pull à col roulé et son tatouage était invisible.
Il ne me restait qu’à la suivre. Grâce à l’ascenseur, j’avais appris qu’elle portait un parfum au jasmin, que son téléphone était un Samsung et que les ongles de ses doigts étaient rongés. Mon enquête avançait mais, normalement, je ne suis pas habillé de la même façon pour fouiller un appartement et filer une suspecte. Cette histoire s’annonçait compliquée, et comme je partais en vacances la semaine suivante, il n’était pas question que je traînasse. Au bout de la rue, elle était montée dans une Fiat verte et j’avais hélé un taxi. Je m’étais changé sur la banquette arrière et c’était un grand blanc que le chauffeur avait déposé, dix minutes plus tard, sur le trottoir. Je la vis disparaitre dans une station de métro. N’ayant pas de tickets sur moi, je perdis cinq minutes avant d’accéder au quai, juste à temps pour la voir, du haut des marches, s’engouffrer dans la rame, à la seconde où les portes se fermaient. Alors que j’en sautais vingt, pour me rétablir en heurtant une rampe et rebondir sur les dix dernières, elle était ressortie du wagon suivant avant que la rame ne démarre. Elle venait d’opérer une rupture de filature ou je ne m’y connaissais pas. Je me claquai un genou en me réceptionnant, puis discrètement, car sûr de moi quoique claudiquant, je la rejoignis et m’installai sur un siège à proximité. A la rame suivante, elle monta et je fis de même. Je m’éloignai d’elle dans le wagon et me positionnai face à une porte, telle une courge blanche qui écoute sa musique intérieure. A la neuvième station, elle descendit, passa le tourniquet, consulta son téléphone et entra dans une brasserie dite d’Alsace, à la chaude odeur de choucroute marinée. Je restai dehors et la vis s’installer à une table, poser un calepin, un autre téléphone que le Samsung, commander un Monaco et prendre un journal. Cet autre téléphone me mit la puce à l’oreille et je décidai de jouer le tout pour le tout, mes vacances sinon rien, et de l’attendre à la porte arrière au vu de ce qu’elle avait fait dans le métro. En tant que noir travesti en blanc, je pouvais revenir à ma couleur initiale en un clin d’œil, par simple balayage des zones visibles, ce que je fis. Je retournai mon pantalon pour en faire un short, enlevai mon pull pour révéler mon tee-shirt NYC, vissai une casquette des Chicago Bulls sur ma tête et pus poursuivre ma filature en toute discrétion. Je la vis se lever et laisser son matériel sur la table, paquet de clopes compris. C’était une prise de risque mais je courus dans la ruelle pour rejoindre l’arrière du bâtiment avec célérité. J’eus le temps de me rencoigner, de réinstaller les albums dans mon sac et de réajuster mon short avant qu’elle ne sorte, l’air de rien, comme si elle ne venait pas de laisser un calepin et un téléphone sur la table qu’elle occupait, sans parler d’un verre à moitié plein. La fourbe. Elle prit vers la gauche et s'éloigna de moi en direction du haut de la rue. Je la suivis du regard et la vis emprunter un Vélib. Cela lui prit une seconde et, sans se retourner, elle s’éloigna dessus. « La vache !!! » Je savais à peine faire du vélo. J’avais arrêté la pratique du deux-roues à l’âge de sept ans, après une réelle passion pendant mes six premières années, suite à un gadin mémorable et traumatique. Elle partait et je me devais de réagir rapidement. Pas de véhicule alentour, je dus me résoudre à m’approcher du socle, où trois vélos restaient fixés, et tirai dessus sans hésiter. Le premier cycle perdit sa roue dans l’impact mais le second se détacha sans bruit. Mon flingue était muni d’un silencieux très silencieux. Je saisis l’engin par le cadre, l’empoignai par le guidon et donnai un coup de pédale qui m’envoya à la poursuite de la fille qui n’était déjà plus qu’une silhouette au loin. Il y avait du vent, je ne voyais rien, les vitesses ne répondaient pas vraiment et ce putain d‘équilibre précaire me recouvrait de suées par vagues. En pédalant, tel un enfant de six ans muni de l’énergie d’un adulte sans alternative, je réussis à maintenir le contact. Comme elle descendait vers les quais, il me fallait un ballon de basket. Un noir sans ballon de basket dans ce quartier, c’était louche. Au port, elle s’arrêta et prit son temps pour remettre le vélo sur un socle. J’en profitai pour récupérer un ballon auprès de jeunes qui consentirent à me le prêter puisque j’étais armé. De l’autre côté de la rue, la fille s’installa sur un banc comme si l’heure du laitier approchait. Une voiture arriva et ralentit, et un carton lourdement scotché lui fut quasiment envoyé au visage, avant que le véhicule n’accéléra et ne disparut à l’angle de la tour de guet. Son colis dans les bras, ce n’était pas du lait, elle se leva et pénétra dans un hangar à une centaine de mètres de là. Je la vis s’enfoncer dans les ténèbres sans hésiter. J’admirai son courage. Pour ma part, l’obscurité m’avait toujours fait peur, bien que je ne l’ai jamais avoué à personne. Armé de mon ballon de basket et parcouru par un petit frisson d’effroi, je me mis à progresser sous les hautes poutrelles du bâtiment de tôle. Au fond, la femme prit un escalier qui menait aux étages. A son insu, je m’enfonçai dans une gaine d’aération qui semblait y mener aussi. La montée fut salissante mais j’eus la satisfaction de découvrir la scène par le haut. Je venais de retrouver Mike, mon débiteur Mike, mon nouveau sponsor, ligoté à une chaise avec sa veste de Dalida, une main emballée dans un chiffon ensanglanté, le teint blafard et le cheveu hirsute. Face à lui, un chauve à lunette agitait une photo sous son nez :
− Le prototype Médimix EC 6207 est notre secret le mieux gardé ! l’avenir de notre petite entreprise électroménagère en dépend ! C’est l’occasion inespérée, pour nous, de combler nos déficits et de nous remettre sur le devant de la scène !!... J’exulte, et voilà que j’apprends qu’un guignol a acheté pour quarante mille dollars de mes chères actions, presque la moitié des parts de l’entreprise, au cours le plus bas, juste avant la remontée vertigineuse que nous annonce la mise sur le marché de notre cher Médimix, le premier appareil de cuisine qui mixe les médicaments à la bouffe de manière sûre, sécurisée et sans altérer le goût des plats !!... J’enrage ! Fort de cette mauvaise nouvelle, Vanessa passe chez toi et te trouve avec une photo de mon invention à la main !! Cela m’a attristé, tu sais !... J’espère que tu souffres ?!... Sache que ton doigt a été envoyé à ton prêteur sur gage pour lui signifier la fin de votre relation financière. Je pense qu’il va mal le prendre et que tu vas avoir un peu de mal à te réinsérer socialement...
Vanessa opina du bonnet vigoureusement. Elle contourna Mike et posa le carton sur la table.
− J’ai récupéré les actions, Boss, et je me suis occupée de la voisine du dessus, elle en savait trop... Les quarante mille dollars de titres du photographe, mon contact à la banque vient de me les remettre. Je n’ai pas eu le temps de recompter...
− Bien ! Ces titres vaudront plus de quatre-vingt-dix mille à la fermeture des marchés ! Hé, photographe, avec ta main intacte, tu vas me signer une cession de tes droits, immédiatement, sinon, je te coupe ton deuxième majeur et je te le fous dans le cul !!
Caché sous le toit, je fus troublé par la teneur de ces propos, explicitement sexuels à connotation dexto-analo-douloureuse. De mon jeune temps, les menaces étaient d’une autre trempe, avec une tenue certaine et bien plus de prestance. Ce type-là, en bas, avec sa gueule de professeur des écoles et son look de premier de la classe chez les nazes, dénaturait la profession. « Avoue ou je te mets ton doigt dans le cul ! » C’était lamentable. A part cela, j’étais en passe de récupérer l’argent, et même plus, ce qui n’était pas pour m’attrister... Sans difficulté, Mike se résigna à signer le papier tendu. Pauvre petit bonhomme qui voyait son rêve de gloire se volatiliser.
− Bien ! J’ai à présent le choix entre deux solutions : ou je te relâche et j’attends que ton pote le prêteur vienne te serrer la main et la gorge, ou je te prépare un poulet au curry au Médimix, recette pour quinze personnes, trois poulets, du riz, du curry et cinq litres d’antigel grand froid. Ouaih ! C’est plutôt cela que je vais faire ! Tu as le droit de connaitre ma cuisine...
Alors, le myope se mit en devoir d’enfourner les ingrédients précités, et d’autres, dans une sorte d’auto-cuiseuse de couleurs vives, aux formes chaleureuses, munie d’un boitier de commande numérique et d’un beau couvercle transparent. Comme il disposait du safran sur la solution d’antigel, le cuisinier s’enquit :
− Vanessa, est-ce que tu peux sommer ce connard de nous dire où il a obtenu la photo de notre appareil...
Vanessa, décidemment une belle plante, plus belle que les yuccas en tout cas, sortit de son jeans le Walther et tira un coup de feu qui couvrit le ronronnement du Médimix.
− Poulette, ne lui coupe pas l’appétit, non plus ! Et évite de lui tirer dans l’estomac, il va en avoir besoin... Voilà, c’est parti, ce sera prêt dans 25 minutes. J’ai rajouté du safran. Vous aimez le safran ?
Et non, Mike n’aimait pas le safran, mais il ne voulait plus contrarier personne, d’autant qu’une partie de sa jambe venait d’être emportée par la balle de 9 mm et que ces fluides corporels commençaient à s’écouler sans retenue. Il préféra éluder :
− Ouaahh ! 25 minutes, c’est bien ! J’imagine que les valeurs nutritives des aliments sont conservées pendant la cuisson ?
− Bien évidemment, mon ami ! Et les principes actifs des médicaments, et les vitamines, et les protéines... Pour l’antigel, on va voir, mais je ne doute pas du résultat… Tu veux une serviette ?
− Oui. Merci.
− Alors ?! dit Vanessa
− Alors ?! Ah oui ! La photo. C’est mon père. C’est lui qui me l’a donnée. Il m’a dit que c’était pour ma collection...
− Et les actions ! C’était pour ta collection ?…
− Non. Il voulait acheter des actions pour valoriser un petit capital en sa possession depuis peu. L’attaque du fourgon blindé Murdoc, il y a deux semaines... Les billets étaient marqués ! C’est pour cela qu’il a voulu en emprunter, pour les blanchir lors du remboursement... Et puis, il m’a demandé d’acheter les actions, il avait mal à sa hanche... Je crois qu’il m’a embobiné sur ce coup-là...
− Je le crois aussi. Ce n’est jamais facile les relations père-fils... On va aller le voir et on va lui proposer de blanchir son fric à notre façon ! Combien il a ramassé à la banque ?
− Quarante mille. C’est ce qu’il m’a dit. Je peux avoir une autre serviette, ça saigne beaucoup !
− Oui. Tu as quelque chose à ajouter ?
− Non. Euh, oui ! Autant le dire, je vous ai pris en photo.
Il regardait Vanessa.
− Quand vous me menaciez, avant de me ligoter. C’est bête, j’avais dans l’idée de commencer un nouvel album, avec des gens et des animaux... C’est le chat de mon père qui m’en avait donné l’idée. Vous étiez mon deuxième modèle...
Vanessa fit mine de lui tirer dessus à nouveau puis se contenta de la frapper.
− C’est prêt, dit le prof des écoles.
Une odeur merveilleuse s’éleva dans l’entrepôt lorsqu’il souleva le couvercle du mixer. Mike le regarda remplir une assiette veillotte avec le mélange de poulet, de riz et de sauce riche en antigel. A cet instant-là, un ballon de basket, surgi de nulle part, rebondit à côté du cuisinier avant de taper contre le mur. Mike observa sa trajectoire et lorsque son regard revint sur son plat, celui-ci était complété par une partie de l’encéphale du chef d’entreprise qui, bizarrement, venait de sentir sa calotte crânienne exploser. Vanessa comprit instantanément, que cette dernière touche culinaire ne rentrait pas dans la recette du jour, mais cela ne l’empêcha pas de se faire toucher au niveau de la poitrine. Elle baissa les yeux pour se rendre compte que son soutien-gorge en plume de soie, et ce qu’il y avait dedans, venait d’être impacté de manière définitive. Dans une dernière pensée, elle se demanda si, sur la photo qu’avait prise Mike, sa poitrine était mise en valeur...
Dans l’odeur opiacée et succulente du poulet au curry, ce dernier vit un noir descendre du plafond, un petit flingue ridicule en main :
− Tu n’as pas vu mon ballon ?
Il était là, à ses pieds.
− Où habite ton père ?
Ce type était curieux et Mike le lui dit. Il aimait bien les gens de couleur. Il en aurait mis dans son prochain album, et des indiens, aussi, pour les plumes.
− Merci, mec ! J’ai peur que ton assiette ne soit altérée, je vais te resservir...
Ce noir n’avait pas tort et Mike apprécia sa prévenance. Dix minutes plus tard, alors que l’antigel mitonné lui perforait les boyaux, il regretta lourdement d’avoir mangé si vite et mourut sans se repentir.
Sur la table, le carton était effectivement plein de titres à l’ordre de la société « BOUFOPAC, produits de qualité », dont le Directeur Général suintait à mes pieds. Hélas, impossible de voir le tatouage de la fille, j’avais tiré dedans. C’est pourquoi j’embarquai, en souvenir, le Médimix et regrettai de ne pas avoir gardé un otage pour sortir du hangar. Seul, je rejoignis la lumière du jour en flippant dans les passages sombres, ceux où les esprits de la nuit risquaient de me mordre les chevilles. Une fois dehors, après un instant d’hésitation, je décidai de repartir en vélo. Finalement, j’avais pris du plaisir à suivre la gonzesse tout à l’heure... Je remontai sur le cycle avec fougue, ce qui me valut de tomber lourdement dix mètres plus loin, mais j’enfourchais, de nouveau, la bête avec entrain et le jour se leva que je pédalais encore, une photo de yuccas et de femme tatouée contre mon cœur...
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